Début des années 2000

Si l'interruption volontaire de grossesse (IVG) est légale en France depuis la loi Veil du 17 janvier 1975, les féministes estiment qu'il faut aller plus loin et plaident en ce sens au début des années 2000. En juillet 2001, le délai légal pour recourir à l'avortement en France est allongé de 10 à 12 semaines. Depuis 2013, l'IVG est remboursée à 100% pour toutes les femmes, mineures ou majeures. En 2014, le délit d'entrave à l'IGV est étendu à l'obstruction de l'information et depuis 2016, le délai minimal de réflexion d'une semaine a été supprimé.

2003

Le 1er février 2003, une marche réunit les femmes des quartiers "contre les ghettos et pour l'égalité", quelques mois après l'affaire Sohane Benziane, qui a mis en lumière les violences subies par les femmes dans les banlieues. Cette jeune fille de 17 ans a été brûlée vive en octobre 2002 par un homme de son quartier de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne). Le mouvement issu de la marche devient une association, présidée par Fadela Amara, au nom explicite : "Ni putes ni soumises".

2008

Créé en 2008, le collectif féministe La Barbe ! s'invite dans les lieux de pouvoir : ses membres apparaissent affublées d'une fausse barbe pour dénoncer la domination masculine et l'absence de femmes dans les milieux politiques, culturels, économiques... Leurs performances s'inspirent de celles des activistes homosexuelles américaines Lesbian Avengers.

2009

En 2009, la réforme Bachelot préconise de baisser les crédit alloués au Planning familial, une association qui lutte pour le droit à la contraception et à l'avortement et défend l'éducation à la sexualité. En réaction, des militantes créent l'association "Osez le féminisme !" pour sauver le Planning et plus largement défendre les droits des femmes.

2011

Né en 2008 à Kiev en Ukraine, le mouvement FEMEN, qui lutte pour les droits des femmes, gagne la France à partir de 2011. Il revendique un féminisme de rue radical : ses militantes apparaissent dans les lieux publics seins nus, des slogans écrits sur la poitrine. S'il est efficace d'un point de vue médiatique, ce mode d'action ne fait pas l'unanimité. "Nous vivons sous la domination masculine, et cela est la seule façon de les provoquer, d’obtenir leur attention", explique au Guardian la cofondatrice des FEMEN Inna Shevchenko.

En 2011, la "Slutwalk" ("marche des salopes"), née à Toronto au Canada, arrive pour la première fois en France. Les femmes marchent pour dénoncer la culture du viol, c'est-à-dire la culpabilisation des victimes de violences sexuelles à qui on explique qu'elles "l'ont cherché" à cause de leur comportement ou d'une tenue aguicheuse, et la manière dont la société humilie les femmes sur la base de leur sexualité.

En mai 2011, "l'affaire DSK" est un coup de tonnerre. Le président du Fonds monétaire international, le socialiste français Dominique Strauss-Kahn, donné favori pour la présidentielle de 2012, est accusé d'avoir essayé de violer Nafissatou Diallo, une femme de chambre guinéenne, dans sa suite à l'hôtel Sofitel de New York. La défense met en doute la crédibilité de la plaignante, DSK évoque une relation consentie. En France, les organisations féministes déplorent la parole soit monopolisée par l'accusé et rappellent les mots de l'anthropologue Nicole-Claude Mathieu : "Céder n'est pas consentir".

2012

La loi pour la parité en politique du 6 juin 2000 prévoit une égalité obligatoire des candidatures femmes et hommes pour les scrutins de liste et une amende pour les partis qui ne présentent pas des candidats de chaque sexe aux élections législatives. Malgré cela et parce que le texte est très incomplet, les hommes restent majoritaires dans les assemblées élues. En 2012, sous la présidence de François Hollande, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault présente un gouvernement strictement paritaire, de 17 hommes et 17 femmes. Mais rien est acquis et le combat de la parité en politique continue.

Le sexisme en politique ne date pas d'hier, mais en 2012, un incident marque les esprits. Lors d'une séance de questions au gouvernement devant l'Assemblée nationale, la ministre de l'Égalité des territoires et du Logement Cécile Duflot arrive en robe à fleurs, ce qui lui vaut de recevoir sifflets et quolibets déplacés. La ministre ne se laisse pas démonter et démarre son intervention : "Mesdames et messieurs les députés, mais surtout messieurs visiblement...". La réaction des députés est pointée du doigt notamment par Najat Vallaud-Belkacem, la ministre des Droits des femmes.

2012-2013

En 2012, François Hollande, alors candidat à la présidentielle, se dit favorable à l'extension de la procréation médicament assistée (PMA) à toutes les femmes, y compris les lesbiennes. Cette annonce suscite beaucoup d'espoirs mais ne sera pas concrétisée dans la loi sur le mariage pour tous. Emmanuel Macron réitère lors de la campagne présidentielle en 2017. La mesure est prévue dans le projet de loi bioéthique, qui n'a toujours pas été adopté, et fait encore l'objet de discussions.

2014

Au début des années 2010, la France pose enfin un nom sur un phénomène que les femmes connaissent malheureusement bien : le "harcèlement de rue", c'est-à-dire les agissements sexistes et le harcèlement sexuel dans l'espace public. Le collectif "Stop harcèlement de rue" naît en 2014 à la suite d'un documentaire de la Belge Sofie Peteers et met en lumière la lutte contre ce phénomène. En 2018, la loi contre les violences sexistes et sexuelles (jugée imparfaite par les associations) introduit une contravention en cas de harcèlement de rue.

2015

En 2015, le collectif féministe Georgette Sand, s'inspirant d'autres pays comme le Canada, fait campagne contre la "taxe tampon" : il réclame l'abaissement de la TVA sur les protections périodiques (tampons, serviettes hygiéniques...), essentiellement utilisées par les femmes, avec l'argument qu'il s'agit de produits de première nécessité. Le 1er janvier 2016, le collectif obtient gain de cause : le taux de TVA sur les produits d'hygiène féminine est abaissé de 20% à 5,5%.

2016

En France, l'égalité salariale entre les femmes et les hommes n'est toujours pas atteinte - les premières gagnent en moyenne 15,1% de moins. En 2017, le collectif Les Glorieuses appelle les Françaises à cesser le travail à partir du 7 novembre à 16h34 : selon ses calculs, c'est à partir de cet instant que les femmes, si elles étaient payées comme les hommes, travailleraient "bénévolement" jusqu'à la fin de l'année.

2017

L'année 2017 marque un tournant médiatique dans le combat féministe. Après l'élection du président américain viriliste Donald Trump, qui suscite les craintes, plusieurs actrices accusent le producteur Harvey Weinstein, magnat d'Hollywood, de harcèlement et agressions sexuelles, dans une enquête publiée par le New York Times. L'actrice Alyssa Milano témoigne sur Twitter et reprend le hashtag #MeToo ("moi aussi"), créé 11 ans auparavant par Tarana Burke, une travailleuse sociale noire de Harlem. La vague est lancée : des millions de femmes racontent à leur tour sur les réseaux sociaux le harcèlement et les violences sexuelles qu'elles ont subi. En France, la journaliste Sandra Muller lance également le hashtag controversé #Balancetonporc.

2018

En novembre 2018, à la veille de la Journée internationale pour l'élimination des violences faites aux femmes, le collectif #NousToutes, fondé quelques mois auparavant à la suite de #MeToo, organise pour la première fois des marches contre les violences sexistes et sexuelles. La marche rassemble 30 000 personnes à Paris selon son instigatrice Caroline de Haas, 12 000 selon les autorités. La deuxième édition de ces marches, en novembre 2019, est encore davantage suivie.

Le féminisme des années 2000 puis 2010 est intersectionnel, c'est-à-dire à la croisée de plusieurs combats. Le courant afroféminisme (dont l'origine peut remonter aux années 1950 aux États-Unis) dénonce ainsi la double oppression que subissent les femmes noires, à la fois le sexisme et le racisme. En France, il est incarné notamment par le collectif Mwasi, né en 2014. En 2018, à l'appel de l'actrice Aïssa Maïga, 16 actrices noires et métisses montent les marches du Festival de Cannes pour témoigner du sexisme et du racisme qu'elles subissent dans leur métier. Et proclament dans un livre : "Noire n'est pas mon métier".

2019

En 2003, le meurtre de l'actrice Marie Trintignant par son compagnon, le chanteur Bertrand Cantat, avait déjà secoué l'opinion publique. En 2017, le président Emmanuel Macron promet de faire de la lutte contre les inégalités femmes-hommes la "grande cause du quinquennat". Mais les associations de lutte contre les violences faites aux femmes dénoncent des baisses de financement. La notion de féminicide, qui désigne le meurtre de femmes en raison de leur genre, gagne peu à peu l'espace médiatique. En 2019, le gouvernement organise un Grenelle des violences conjugales. En face, les associations réclament des moyens : "Nous voulons un milliard".

Fin des années 2010

Avec les préoccupations autour du réchauffement climatique, on assiste, à la fin des années 2010, à un retour de l'écoféminisme, né dans les années 1970. Ce mouvement estime que "la destruction de la nature et l'oppression des femmes ont la même origine" : le patriarcat et le capitalisme. L'un de ses courants de pensée voit un lien particulier entre les femmes et la nature.

La sexualité devient elle aussi un champ de résistance féministe : les militantes revendiquent le droit au plaisir féminin, une meilleure connaissance du corps féminin (notamment du clitoris)... Bien sûr, le combat féministe ne s'arrête pas là. Parmi les revendications remises en avant par la jeune génération, on peut aussi citer l'écriture inclusive, la lutte contre les stéréotypes de genre...